Avant de faire connaissance avec les 24 runes du Futhark, voici quelques règles essentielles pour vous permettre d'apprivoiser l'alphabet sacré des Vikings.
Une rune n'est pas simplement une lettre d'un vieil alphabet viking - dicté, nous dit la légende, par le dieu Odin - c'est un outil initiatique. Une empreinte énergétique. Un code d'accès qui nous connecte à une Magie de Pouvoir ancestrale très puissante.
Le premier alphabet runique ou Futhark - contraction des trois premières lettres de cet alphabet - serait né entre 50 et 800 après Jésus-Christ.
Cette écriture secrète et sacrée, fut utilisée par les Celtes, les Germains et les Scandinaves comme support de divination et de pratiques magiques ou religieuses.
Les runes étaient gravées avec des instruments pointus et du sang humain ou animal. Les supports étaient divers : bois ou galets pour la divination, pierres, parchemin ou métal pour la magie talismanique.
Le Futhark ancien est composé de trois groupes de huit runes, désignés par le nom de Huit ou Oett. Le premier groupe porte le nom de Frey, dieu de la fécondité. Le second groupe de huit runes porte le nom de Hagall qui représente la grêle, force élémentaire de la nature. Ces runes représentent l'avenir et l'accomplissement. Le dernier groupe de huit runes porte le nom de Tyr le dieu de la guerre, la plus ancienne divinité scandinave. Comme Odin, il représente l'illumination et le courage.
Première lettre du Futhark ancien, Fehu est consacrée au dieu scandinave de la fertilité, Frey dont le nom signifie "seigneur". Fils de Njord, dieu de la mer et du rivage, et frère de Freya, déesse de l'amour, Frey est le dieu phallique de la paix, du bonheur et de l'abondance.
Celui qui permet d'ensemencer la terre et le ventre des femmes. Frey vit dans un merveilleux palais où il règne sur le monde des lutins et des elfes.
La première fête en l'honneur de Frey avait lieu au printemps. Durant cette cérémonie se produisait l'accouplement rituel d'un prêtre et d'une prêtresse qui étaient considérés comme le Seigneur (Frey) et la Dame (Freya).
Pour les Vikings comme pour les Pharaons, les unions entre frères et soeurs étaient monnaie courante.
Ce rite sexuel, dont il existait une équivalence chez les Celtes a survécu sous la forme, très édulcorée, de la coutume de couronner un roi et une reine de Mai (particulièrement en Angleterre). En France, seule la reine de Mai existe encore.
Le culte de Frey comportait des actes sexuels rituels, la prostitution sacrée, des danses, des mariages sacrés, des rites d'initiation sexuelle et des hommes travestis en femmes.
L'autre fête en l'honneur de Frey était celle des moissons qui avait lieu au mois d'août. Les Vikings l'honoraient en faisant des courses de chevaux.
La rune Fehu implique un pouvoir phallique, exprimé aussi bien à travers le symbole du bétail (signe d'abondance pour les tribus indo-européennes) qu'à travers la représentation de Frey.
La strophe du poème runique anglo-saxon qui lui est associée enseigne que l'argent ou les possessions matérielles ne doivent pas être considérés comme des moyens en vue d'une fin :
La fortune est une consolation pour chacun, Mais il doit la partager, pour celui qui espère tirer au sort son jugement devant les dieux.
Symbole du pouvoir brut, de la force et de la virilité, la rune Uruz est associée au buffle sauvage et à ses cornes, symbole d'inviolabilité.
Dans les traditions celtiques, les textes épiques évoquent à un personnage, Conganchnes, littéralement peau de corne, qui est totalement invulnérable, sauf par la plante des pieds. Il servira de modèle à Homère pour évoquer Achille et son célèbre talon.
Les artistes du Moyen Âge représentaient souvent les héros ou les personnages bibliques avec des cornes. Ceci n'était pas pour indiquer une quelconque nature diabolique, mais le signe de leur communication directe avec les forces divines. Parfois, Odin est représenté lui aussi avec des cornes comme le dieu celtique Cernunnos.
Dans les religions païennes, les cornes représentaient l'énergie vitale et sexuelle. Les dieux cornus étaient considérés comme des messagers entre le monde matériel et le royaume des dieux.
- Extérieurement, elle évoque le principe actif et masculin par sa forme et sa force de pénétration.
- Intérieurement, par son ouverture en forme de lyre et de réceptacle, elle représente le principe passif et féminin.
En réunissant ces deux principes dans la formation de sa personnalité, l'être humain parvient à la maturité, à l'équilibre et à l'harmonie intérieure.
La rune Uruz représente donc l'aptitude de l'être éveillé, capable de s'affirmer dans la vie et de faire bon usage du Wyrd ou destin.
La rune Thurisaz est associée à Thor, dieu de la force guerrière qui s'annonce par le roulement du tonnerre et la lueur des éclairs. Thor est le bon colosse au grand coeur, plus simple que méchant.
Fils d'Odin et de la déesse Jord, qui symbolise la terre sauvage, il est le plus important des dieux après son père. Thor est "brave" mais malheur à qui ose le défier, car il combat comme le plus impitoyable des dieux guerriers.
Thor est l'archétype germain du colosse au grand coeur des contes populaires. Celui qui ne peut se sortir des situations périlleuses qu'à l'aide de sa force et non de son intelligence.
Déjà, Tacite mentionnait chez les Germains un Thunraz, assimilé à Hercule, qui n'était autre que le Thor nordique.
Un jour, Thor reçut, forgé par les nains, une arme redoutable : le marteau Mjolnir - littéralement, le concasseur -. À chaque coup de ce marteau, dans un roulement de tonnerre, la terre entière tremble.
Ce marteau, symbole de pouvoir et de puissance, c'est la foudre indo-européenne.
Dans la dernière période préchrétienne, le marteau de Thor devint un symbole religieux porté en amulette, tête en bas.
Ansuz est associée au concept d'être suprême dans la mythologie germano-scandinave.
L'être suprême, était Odin (le patriarcat était déjà bien en place), comme le suggère son titre de Father (père universel).
Il était le principe masculin qui prit la suite du principe féminin incarné par la Déesse Mère (mère universelle) : principe cosmique de la force vitale qui se diffuse à travers l'Univers.
Odin était le vieil homme sage, le chaman et le magicien archétypal. Ansuz signifie d'ailleurs littéralement : Prince d'Asgard et seigneur du Walhalla, titres employés pour définir Odin.
Odin est, avant tout, le maître de la sagesse. S'il n'a pas créé le monde, il le gouverne (on l'appelle parfois Alfadir, le Père de Tout), et chacun doit lui obéir. Étant le dieu qui apporte à la fois la mort et la vie, il a créé, avec ses frères Hoenir et Lodur, les premiers humains : Ask et Embla.
Un mythe scandinave rapporte qu'au moment de créer l'être humain, Odin hésita sur la façon de s'y prendre. Finalement, il décida de modeler le premier homme, Ask, à partir d'un frêne, et la première femme, Embla, à partir d'un aulne.
La raison de ce choix est aisée à comprendre : c'est que pour faire du feu, on utilisa longtemps en Germanie un morceau de frêne (bois dur) que l'on faisait tourner dans un morceau d'aulne (bois tendre). L'étincelle qui en jaillit anima les deux morceaux du souffle vital, et ils devinrent le premier couple humain.
Odin reste donc avant tout celui qui insuffle l'esprit. Il connaît le secret des sciences et le mystère des runes. Alliant courage et sagesse, il est un voyant, un magicien et un arbitre.
Les Romains assimilèrent Odin à leur Mercure, messager des dieux.
Cette rune renvoie à la transmission orale du savoir et à la valeur magique de la parole.
Associée à la roue, symbole important dans les sociétés anciennes, la rune Raidho évoque le voyage.
Si la roue est un symbole solaire, elle est aussi une représentation du monde.
Dans la mythologie celtique, Taranis, le Tonnant, est aussi appelé le dieu à la roue cosmique. Taranis est aussi un pilier de l'Univers, au même titre que le héros mythique irlandais Cûchulainn.
Le héros celtique irlandais Cûchulainn est capable, lors de transes guerrières, de se transformer en une roue énorme et flamboyante par les contorsions de son corps.
La roue est aussi symbole de changement et du retour des formes de l'existence. Elle implique un mouvement perpétuel de l'Univers.
La rune Raidho nous enseigne qu'il ne faut compter que sur soimême pour progresser. Il n'y a pas de gourou au sens oriental du mot dans le paganisme. Il existe cependant des figures divines ou semi-divines, comme Odin ou Merlin, qui assument le rôle de guide spirituel pour aider le chercheur. À des moments inattendus, ces guides peuvent surgir dans la vie, habilement déguisés sous des formes humaines. Ils peuvent offrir conseils et connaissances, mais n'interviennent pas sur le libre arbitre du chercheur, car celui-ci doit apprendre à vivre par lui-même. Il ne doit pas craindre de voyager et de se plonger dans le monde extérieur, pour acquérir de l'expérience.
La vie est une initiation : elle n'est pas facile, et le wyrd (destin) est le plus grand initiateur que l'on puisse trouver.
La rune Kenaz symbolise la torche, une flamme vivante, pâle et brillante. Le symbolisme de la torche ou du flambeau rejoint celui du feu. Elle est une représentation symbolique de la lumière.
Dans un passé lointain, un cercle de torches brûlantes, disposées autour du campement, produisait une lumière et un feu protecteur contre les bêtes sauvages, ou une attaque d'ennemis humains.
La flamme vivante de la torche est un symbole de purification, d'illumination et d'amour spirituel. Elle est l'image de l'esprit et de la transcendance : l'âme du feu.
Le feu peut être créateur, obtenu par frottement, il est l'image de la force vitale, l'esprit créateur qu'Odin insuffla à Ask et Embla, le premier couple humain.
Dans la mythologie scandinave, le feu est l'une des énergies jumelles primitives, qui crée puis soutient l'Univers. Il symbolise ainsi la puissance créatrice qui circule à travers le milieu du monde, détruisant et renouvelant tout sur son passage.
Car le feu, qui n'est pas un élément, mais qui transcende trois formes de la matière en les mutant et en les permutant, est le symbole le plus exact de l'énergie spirituelle sans laquelle rien n'existe.
Le feu de Kenaz représente la connaissance et la sagesse acquises par l'expérience (évoquée par la rune précédente : Raidho) qui nous guide et nous écarte de l'erreur.
La rune Kenaz indique aussi au chercheur que, de même qu'il progresse sur le chemin spirituel, il doit laisser sa lumière intérieure illuminer la vie des autres : c'està-dire qu'il doit faire profiter autrui de son expérience et aider les autres à avancer.
La rune Gebo symbolise le don, le présent. Mais il s'agit d'avantage des cadeaux que l'on offre que ceux que l'on reçoit. Comme l'hospitalité était un devoir sacré, le don était un aspect très important de la philosophie sociale des Germains. En effet, le don imposait une responsabilité à la fois au donneur et au receveur. Un individu était jugé socialement par le nombre de cadeaux qu'il offrait aux moins fortunés.
D'un point de vue religieux, "une offrande aux dieux" désigne un sacrifice offert à une divinité. Le plus souvent, le sacrifice était celui d'un animal, mais il pouvait aussi s'agir d'un être humain, consentant ou non. En effet, dans les cérémonies consacrées à Odin, les prisonniers de guerre ou les criminels coupables de délits graves étaient condamnés à mourir rituellement. Ils étaient étranglés à l'aide d'une lanière de cuir. C'est une très ancienne forme de meurtre rituel, comme en atteste la découverte de cadavres momifiés de l'âge du fer préservés dans les tourbières danoises.
La pendaison était aussi très présente dans le culte d'Odin (le corps bien conservé, vieux de deux mille ans, retrouvé dans le Jylland, au Danemark, en 1950, paraît bien être celui d'un homme pendu à l'occasion d'un sacrifice à Odin).
L'utilisation de la strangulation et de la pendaison était peut-être un rappel mythique perverti de la pendaison d'Odin à une branche d'Yggdrasil (illustrée par la carte du Tarot : le Pendu).
Gebo (désignée aussi par certains runistes sous le nom de Gyfu) est donc une rune de sacrifice personnel.
Elle enseigne au chercheur spirituel qu'il y a toujours un prix à payer pour progresser.
La rune Wunjo se rapporte à la joie et au bonheur, comme le montre clairement la strophe du poème runique anglosaxon qui lui est associée :
La joie est pour celui qui connaît peu la peine, sans affliction on obtient progrès et bénédictions.
Le premier vers évoque la vie rude qui était le lot quotidien de la plupart des gens en Europe à l'époque où l'alphabet runique était utilisé.
La deuxième ligne, dans ce contexte social, semble considérer la joie durable comme une utopie et évoque une société idéale où règnent la paix et l'abondance.
Wunjo (Wynn, pour certains runologues) nous enseigne que le bonheur surgit dans n'importe quelle situation d'où la peine est absente. Mieux encore que le bonheur naît de l'absence de malheur.
Cette rune philosophe nous incite à apprécier les petits bonheurs fragiles qui illuminent notre vie. Elle nous rappelle que le bonheur, comme le malheur, ne dure jamais car tout est en perpétuel changement : après une période d'obscurité et d'accablement, le soleil intérieur finit par revenir.
La philosophie scandinave condamnait la faiblesse et le pessimisme. Elle poussait, au contraire, à toujours relever la tête et à lutter.
Les peines, pour les Vikings, étaient des épreuves envoyées par le pouvoir du destin (wyrd), et adopter une attitude positive et constructive est l'unique moyen pour les surmonter.
Wunjo offre la promesse que rien n'est immuable ou définitif et que le cours du présent peut être inversé.
L'espoir ne doit pas être abandonné dans l'épreuve, car nous ne sommes pas isolés de l'Univers. Le royaume des dieux est en nous, si nous savons le trouver.
Il appartient donc à chacun de choisir de suivre le mouvement du Wyrd ou d'être entraîné par lui en esclave.